Féminisme et écologie, un même projet d’émancipation

Le : 29 mars 2021

Ces deux luttes sont liées, elles déconstruisent les rapports de domination, d’exploitation et de conquête au nom de l’Homme, dont la lettre capitale ne dissimule plus la posture prédatrice qu’il a tant incarnée.

En même temps qu’il fondait la rationalité de notre science moderne dans son Discours de la méthode, Descartes lui assigna spontanément l’objectif de nous rendre «maîtres et possesseurs de la nature» afin de «jouir, sans aucune peine, des fruits de la terre». On l’imagine aisément vierge et indigène, cette terre de conquête bientôt possédée par son maître…

Le XVIIe siècle occidental marqua le basculement d’une nature perçue comme nourricière et providentielle, dont il fallait respecter et préserver la manne, vers une ressource consommable, à même d’étancher toutes les avidités de qui saurait le premier la dompter. A la même époque, une poignée d’honnêtes hommes entreprit de viriliser la langue française pour se l’approprier, escamotant l’autrice et quelques-unes de ses sœurs, qui figuraient alors au lexique, et instaurant que le masculin dorénavant l’emporterait sur le féminin.

C’est également ce même siècle qui offrit à la France son premier empire colonial et la prospérité du commerce triangulaire. Quoique d’apparences distinctes, ces mouvements s’accordaient en fait dans le schéma dualiste caractéristique de l’époque : la raison contre l’émotion, le civilisé contre le sauvage, la science contre la nature, l’homme contre la femme… Cet héritage occidental, parachevé par la révolution industrielle, a façonné nos sociétés pour le meilleur et pour le pire.

 

Vers la déconstruction des rapports de domination

L’écologie et le féminisme sont liés par la déconstruction symétrique de ces rapports de domination, d’exploitation et de conquête au nom de l’Homme – cet Homme prétendument universel dont la majuscule ne dissimule plus la posture prédatrice qu’il a tant incarnée.

Prendre, utiliser, jeter. Le triptyque est au fondement de notre économie productiviste, depuis la révolution industrielle. Il en découle un asservissement du monde minéral, végétal et animal, l’affranchissement des contraintes qu’imposent la régénération de la nature et la cupidité comme moteur de développement. Jusqu’à la dévastation. Derrière cet accaparement sauvage se cache un dessein de l’immédiateté, l’absence de pensée du futur et la jouissance de l’instant comme valeur supérieure.

 

C’est exactement le même mouvement qui fait des violences sexistes et sexuelles un problème systémique que les #MeToo successifs ont mis en lumière : prendre, utiliser, jeter… dans une jouissance qui profite à quelques-uns au détriment du plus grand nombre, sans égard pour les conséquences, sans empathie pour l’altérité. Au fond, ce triptyque est même beaucoup plus général : il peut aussi s’appliquer aux salarié·es les plus précaires, tout autant qu’aux travailleur·ses immigré·es…

 

Donner à tous les humains la visibilité et le respect qui leur reviennent, préserver les équilibres de la société comme ceux des écosystèmes, toujours penser le primat du commun et du temps long, redonner dans ce cadre du sens à nos actions et retrouver enfin la jouissance de nos vies… tel est le projet d’émancipation collectif que portent l’écologie, le féminisme et les mouvements d’émancipation, comme la lutte contre le racisme.

 

Il n’y a donc rien de surprenant à voir la société se saisir avec vigueur de ce projet, dans ses différentes composantes, qui toutes émergent au même moment. Les #metoo, les marches pour le climat, les rassemblements contre les violences racistes, les gilets jaunes… tous ces mouvements racontent, au fond, la même histoire : celle d’un rapport des forces qui n’est plus tolérable en l’état, d’une fin de cycle, d’un changement systémique devenu indispensable ; et pour passer enfin des promesses aux actes, celle d’une folle aspiration à réinvestir le champ du pouvoir…

C’est une bataille culturelle qui se joue ici, comme on l’a vu émerger de manière si criante aux Etats Unis ou encore au Brésil, entre les partisans d’une prédation assumée, virile et fière, et celles et ceux qui défendent une société plurielle, égalitaire, coopérative et soucieuse de préserver l’environnement, comme en Nouvelle-Zélande. Pour que cette bataille soit victorieuse, il faut à la fois que la société civile la mène avec force et qu’elle trouve un débouché politique. Alors mobilisons-nous et unissons nos énergies ! C’est l’avenir immédiat de notre société qui est en jeu.

L’urgence environnementale, sociale et démocratique tambourine à notre porte. Oui, les temps doivent changer.

 

Oui, les temps changent.

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